Les malheurs d’Emma

La guerre de 14-18, la grande guerre, celle qui devait être « la der des der » a meurtri de nombreuses familles, en France comme en Allemagne. La grande famille Argence ne fait pas exception à la règle avec – pour ne parler que des victimes retrouvées et identifiées – pas moins de 21 morts. Ne passons pas sous silence les militaires qui ont été distingués par des décorations, de la médaille de la Résistance, de la Légion d’honneur ou de la Croix de guerre. Si le sujet vous intéresse, vous trouverez une liste ici.

Mais pour l’instant je vous propose un petit bond dans le temps destination 1894 dans les Hautes Alpes, plus précisément à Réotier, petit bourg qui compte environ 500 habitants à l’époque (à peine 200 aujourd’hui).

Augustin Argence est natif d’Eglyers, à une dizaine de kilomètres de Réotier. Il est gendarme, veuf de Julie Aymar décédée en octobre 1893 et s’apprête à épouser Emma Bourcel. Emma est de 24 ans sa cadette, ils sont âgés respectivement de 49 et 25 ans. L’un et l’autre veulent des enfants, ils en auront quatre.

Le 13 avril 1895, naissance du premier de la fratrie, Augustin (Henri Emile Augustin),
17 avril 1896, vient au monde son petit frère Emile Joseph Adrien,
Puis le destin les comble avec Félix François, qui naît le 21 janvier 1898.
Le destin les comble, oui, d’accord, mais Augustin et Emma aimeraient bien avoir une petite fille… On laisse passer un peu de temps jusqu’en 1910, et le 1er juillet 1911, ça y est !
Mais encore un garçon, il s’appellera Joseph Adrien.

Lorsque le ciel s’assombrit sur l’Europe et que la guerre éclate, Joseph n’a que 3 ans, Félix 16 tandis qu’Emile en a tout juste 18 et l’aîné, Henri, est âgé de 19 ans.

Augustin fils
Nous sommes donc en 1914. L’an dernier, le jeune Augustin a eu la très mauvaise idée de s’engager pour un service de 3 ans, en mai 1913, il est donc incorporé depuis le 19 mai 1913 comme soldat de 2e classe. Il est nommé Caporal en février 1914 et Sergent en juillet de la même année, au moment de la déclaration de la guerre. Dès le mois d’août 1914, le 159e régiment d’infanterie est engagé dans la campagne contre l’Allemagne dans les Vosges. Dès la fin du mois d’août, les combats sont terribles et il s’illustre héroïquement. Il tombera malheureusement lors des hostilités qui ont lieu à Ste Barbe (Vosges) entre le 29 août et le 1er septembre et sera identifié et officiellement déclaré Mort pour la France en date du 11 octobre 1914. Sa guerre aura duré un mois. Sur le registre matricule on peut lire : « Cité à l’ordre du Régiment. Très bon sous-officier tombé glorieusement pour la France en août 1914 à St Benoît (Vosges). Croix de guerre étoile de bronze ».

Emile
Le 8 avril suivant, c’est au tour d’Emile de quitter le foyer pour aller à la guerre. Peut-on imaginer l’état d’esprit du garçon qui part faire la guerre qui lui a enlevé son grand frère ?
En campagne contre l’Allemagne du 8 avril 1915 au 24 avril 1918, il est passé 1e classe le 3 avril 1917. Comme il est noté dans le registre matricule, il assure des missions d’agent de liaisons entre l’arrière et les premières lignes « avec courage et dévouement sous le feu des mitrailleuses ennemies et de violents tirs de barrages ».

Augustin, le chef de famille, le mari d’Emma, s’éteint le 5 janvier 1917.

Revenons à Emile, qui se trouve dans dans les Flandres, en Belgique. Le 25 avril 1918 au Mont Kemmel, Emile manque à l’appel. Disparu. On va se rendre compte que le malheureux, sans doute trop hardi, a été fait prisonnier. Il ne sera rapatrié que huit mois plus tard, le 21 décembre 1918. Il est intégré au 157e régiment d’infanterie en janvier 1919 et nommé Caporal.
Le 25 avril 1919, Il se voit gratifié de la Croix de guerre étoile de bronze, avec un certificat de bonne conduite, et mis en congés de obligations militaires au titre de cultivateur le 29 août 1919.
En décembre 1919, Emile partira s’installer dans les Bouches du Rhône. Il décèdera paisiblement à Aix en Provence en 1976, à l’âge de 80 ans.

Félix
On imagine l’angoisse d’Emma lorsque son troisième fils signe son engagement militaire pour 4 ans, le 11 novembre 1916 au bureau de recrutement installé dans la mairie de Gap.
Félix sera en campagne contre l’Allemagne de novembre 1916 à octobre 1919, dans l’artillerie et sera incorporé au service du C.O.A.M.P. (Centre Organisation Artillerie de Montagne et Positions). Il est renvoyé dans ses foyers le 10 juillet 1940.

Joseph
Le petit dernier n’a que 7 ans à la fin de la guerre, il aura échappé à toute cette horreur. La guerre va-t-elle le rattraper ? Il aura 28 ans au début des hostilités de 39-45. Mais c’est une autre histoire…

Emma meurt en 1946, âgée de 77 ans.

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Créé par David Argence
(Baeserta : Divinité celtique des Pyrénées • Déu celta dels Pirineus)