Le 6 décembre 1914, Antoine Argence, du 4ème Zouaves, disparaissait à Pipegael, dans les marécages de l’Yser, pendant la tentative de prise de « La Maison du Passeur » en Belgique.
Ce jour là il faisait froid et il pleuvait. Pour ralentir la marche allemande, les néerlandais avaient ouvert les digues…
Les Zouaves vivaient dans l’eau des prairies de l’Yser inondées. Pas question de creuser des tranchées…
L’empereur Guillaume s’était déplacé pour assister à la victoire de son armée dans la course à la mer, la tension était particulièrement forte.
Ils étaient quatre à mourir ce jour là. étaient-ils ces 4 Zouaves attrapés par l’ennemi, utilisés comme boucliers humains, et qui criaient à leurs camarades « Ne faites pas attention à nous, tirez ! »
Ils ont été enterrés par leurs camarades dans ce qui allait devenir la Nécropole St Charles de Potyze qui s’étend aujourd’hui sur 29900 mètres carrés. Ces toutes premières tombes ont été explosées dans les jours qui ont suivi, dans la fureur des combats.
Antoine dort dans une terre glacée où l’on parle une langue qui n’est pas la sienne, sans nom, sans plaque, sans fleurs.
Ce 6 décembre est devenu un jour maudit. C’était justement l’anniversaire d’Augustin, mon grand-père, plus jeune frère d’Antoine qui était le puîné de sa fratrie. Depuis ses 14 ans, Augustin n’a plus jamais voulu fêter son anniversaire. Même dans la vieillesse, il n’acceptait aucun vœu, aucun baiser, aucun rappel du malheur qui avait crucifié sa famille et l’avait privé du modèle sur lequel il se projetait.
– Catherine Argence